Madame de Sévigné

C’est en 1725 que paraît une mince plaquette de 75 pages, titrée : Lettres choisies de madame la marquise de Sévigné à madame de Grignan, sa fille, qui contiennent beaucoup de particularités de l’histoire de Louis XIV. Pour modeste que soit l’opération éditoriale, elle inaugure une vaste entreprise qui va peu à peu situer une simple correspondance au rang d’œuvre exemplaire, illustrant parfaitement l’esprit du XVIIe siècle dont elle est l’expression la plus humaine dans sa perfection, la plus intime dans la politesse exquise dont elle se pare. Madame de Sévigné s’abandonne dans sa correspondance aux caprices du jour, aux humeurs de l’instant et ne prend nulle précaution, nulle parade pour se faire valoir et donner un sens à sa démarche créatrice. Etant l’auteur d’une œuvre qui n’a pas de plan, et nul but, nulle cohérence que le genre qu’elle adopte, nulle visée que d’entretenir quelques correspondants choisis et bien-aimés, des potins de la ville et de la province, des aléas de la vie domestique. L’esprit de l’auteur, celui d’une femme de caractère, est d’une singulière originalité, portant finalement cet amoncellement de lettres vers l’unité voulue d’une œuvre littéraire.